Droopy

Droopy voit le jour en 1943 sous le crayon acéré de Tex Avery. Petit chien blanc aux paupières lourdes, il n’a rien d’un combattant au premier abord. Pourtant, derrière son air abattu, il cache une ténacité sans faille. Il avance lentement, parle d’une voix monocorde, mais ne lâche jamais sa proie. Sa première apparition dans "Dumb-Hounded" le met face à un loup en cavale. Peu importe où ce dernier tente de fuir, Droopy est déjà là, imperturbable, réduisant chaque tentative à néant.

Son flegme est son arme. Tandis que d’autres s’agitent, Droopy reste de marbre, observant, agissant avec une précision implacable. Il affronte des brutes bien plus grandes que lui, des escrocs, des criminels, mais le résultat est toujours le même : il gagne, méthodique et sans effort apparent. Ce décalage entre son attitude et son efficacité crée un humour redoutable. Son regard blasé devient sa signature, un défi lancé aux adversaires qui, tôt ou tard, finiront par mordre la poussière.

À la MGM, Tex Avery exploite Droopy jusqu’en 1958. Dans "Northwest Hounded Police", il traque encore un loup en fuite, apparaissant toujours à l’endroit exact où ce dernier tente de se cacher. Dans "Senor Droopy", il devient toréador, impassible face aux assauts du taureau. Peu importe le contexte, la mécanique est la même : un adversaire arrogant, sûr de sa supériorité, qui finit broyé par l’implacable logique du chien aux paupières tombantes.

Droopy évolue à la télévision après la fermeture du département d’animation de la MGM. Il apparaît dans Tom et Jerry Kids dans les années 90, accompagné de son fils Dripple. Sa voix, d’abord incarnée par Roger Carel dans les années 70 et 80, passe ensuite à d’autres acteurs, chacun préservant cette tonalité plate et dénuée d’émotion qui le rend si distinctif.

Avec le temps, Droopy s’infiltre dans la culture populaire. On le retrouve dans un jeu vidéo, dans des jeux de société et d'autres produits dérivés. Il demeure une anomalie fascinante dans l’univers des cartoons : un personnage ni vif, ni expressif, mais terriblement efficace. Dans un monde bruyant et hyperactif, il prouve qu’une simple phrase, dite sans élever le ton, peut suffire à renverser un affrontement : You know what? I’m happy.